Le sens de ces deux mots est particulièrement intéressant même s’ils sont souvent confondus dans notre langage courant.
Défier :
Inviter (qqn) à venir se mesurer comme adversaire. Défier qqn en combat singulier. Défier qqn aux échecs.
Au figuré : Refuser de se soumettre à. ➙ affronter, braver. Défier la mort.
J’entends surtout dé-fier autrement dit se méfier, ne pas être en confiance avec l’objet, l’action ou la personne que je vais alors identifier comme un adversaire. C’est d’ailleurs l’étymologie du mot en latin deffiderer (ne pas se fier à). Il y a donc dans ces mots défi, défier, l’idée première d’être face à un adversaire. Dans notre monde tout devient défi : défis sportifs, défis économiques, défis politiques, défis sanitaires, etc.
Alors quels sont donc ces adversaires que nous devons vaincre. Car qui dit adversaire dit défaite ou victoire. Donc dit lutte, guerre, violence et parfois haine.
L’adversaire d’advertere en latin veut dire se tourner contre… ou vers. Paradoxal n’est-ce pas, l’adversaire ne serait pas forcément celui que l’on doit renverser. À moins que par défi nous allions au-devant de l’adversité et/ou de l’adversaire. Car pour la plupart d’entre nous qui faisons dépendre notre sécurité des conditions extérieures, quoi de mieux qu’un adversaire pour se sentir ex-ister (se tenir hors de). L’autre devient l’objet à abattre et ce faisant nous donne une sorte de réassurance quant à notre existence. Je n’ai qu’à regarder l’emballement face à la victoire de l’équipe de France « contre » celle du Maroc. Enfin une « bonne » raison de se réjouir, de se sentir vivant par joueurs interposés. Et peu importe que les arbitres n’aient pas accordé deux penalties au Maroc, nous avons « vaincus ». La fin justifie les moyens.
Le défi ne nécessite pas de courage, éventuellement de la persévérance, de la discipline mais surtout de l’inconscience.
Oser : Entreprendre avec assurance (une chose difficile, périlleuse).
Contrairement à défier, oser n’a pas besoin d’adversaire extérieur. C’est avant tout une posture face à soi-même. Elle nous invite à aller de l’avant vers l’inconnu, à se fier à nos capacités, nos ressources, au mouvement de la vie. La plus belle anagramme d’oser est ROSE. Vous rappelez-vous du poème de Ronsard, Mignonne allons voir si la rose… j’oserai une interprétation personnelle qui met en exergue l’accueil de l’impermanence, de l’inconnu, du mouvement de la vie.
Et oser n’a pas fini de nous surprendre puisqu’il contient aussi ÉROS. Là encore dans le plaisir de jouer avec les mots, oser deviendrait le désir pour/de soi. Oser c’est accueillir l’en-vie d’être à soi, malgré les croyances, les limitations posées par l’extérieur. Malgré les peurs.
Oser nous demande de regarder la peur en face, notre peur. Et il n’est plus question d’adversaire extérieur mais d’humanité dans sa vulnérabilité. Oser ne nous demande pas de franchir des limites, de nous mettre en danger pour nous sentir ex-ister. Oser appelle notre certitude intérieure que ce que nous ressentons au plus profond est juste. Oser nous parle de foi en soi, en l’autre, en plus grand que nous. Oser nous parle d’un abandon de nos références extérieures pour aller vers l’abandon à notre âme, notre cœur.
Dans l’ancien testament, Osée est un prophète dont le nom en hébreu signifie « sauve ». Toutes ses prophéties parlent d’union entre Dieu et l’homme.
Oser c’est nous sauver. Nous sauver de l’enfer-me-ment (https://www.lamourmedecin.fr/?p=199). Cet enfer qui nous fait oublier Qui nous sommes pour fuir la peur de notre vérité intime.
Dans la période que nous traversons allons-nous choisir le défi ou l’audace. Allons-nous regarder l’Adversaire (l’autre, la mort), nous dé-fier ? Ou choisir d’oser vivre fidèle à ce qui nous anime ? La compromission n’a plus de place. Les « petits arrangements » avec nos peurs, ou nos amis ne marchent plus.
Pour faire un pas, monter une marche, il nous faut passer par le déséquilibre, l’in-attendu. Saurons-nous oser en confiance accepter cet inattendu, cet inconnu pour ouvrir à nos enfants un espace de sécurité ? C’est notre défi collectif puisque l’adversaire n’est autre que nous-même.
Osons être et regardons au plus profond de nos cœurs pour découvrir que Tout est déjà là.